Omnium toujours plus réactif

20.11.2016

Journal du Textile

Le Groupe de distribution de textile-habillement veut à la fois renforcer ses enseignes Devred 1902, Burton of London et Eurodif et les rendre plus réactives.

« Nous n’assistons pas seulement aux effets de la crise, mais davantage à un changement radical, à un bouleversement brutal du monde du commerce. Nous sommes soumis à la concurrence agressive des grandes enseignes internationales, notamment via le web. N’étant pas soumises aux mêmes règles que nous, elles peuvent venir facilement sur nos marchés et y casser les prix. Cela étant, nous n’entendons pas assister en spectateurs impuissants à cette situation. Il faut savoir évoluer et réagir. C’est le propre d’ailleurs du métier de commerçant que de savoir réagir et s’adapter. Et aujourd’hui plus que jamais, nous sommes dans un monde qui change. Donc il faut faire de même ».

Robert Lascar n’est pas homme à s’épancher et encore moins à expliquer sa vision de l’univers dans lequel se meut son groupe. Mais lorsqu’il consent – rarement – à sortir du silence, le dirigeant du groupe de distribution d’habillement français Omnium de Participations (Burton, Devred, Eurodif) porte un regard incisif et pertinent sur cet univers qu’il connait depuis toujours. Un regard qui le conduit à des analyses, dont celui qui se présente comme un « pragmatique » sait tirer rapidement des conclusions pratiques.

Et cela lui réussit plutôt bien. Bon an mal an, et malgré les vicissitudes que subit le marché de l’habillement actuellement (à commencer par « une seconde quinzaine d’août caniculaire, qui a maintenu les gens chez eux, alors que, du point de vue de la consommation textile, le mois démarrait bien »), son groupe familial continue de croître. En 2016, Omnium a réalisé un chiffre d’affaires de 584 millions d’€. Il était de 526 millions quatre ans plus tôt. Il évolue ainsi dans les rails de ce qui avait été fixé lors du projet de développement « Force 2017 ». Ce dernier arrivant d’ailleurs à terme. Surtout, les objectifs fixés dans le cadre du nouveau plan stratégique, qui a pour horizon 2020, sont dans la même veine. Omnium de participations espère atteindre, à cette échéance, un chiffre d’affaires global de 657 millions d’€. Chiffre d’affaires réparti de la manière suivante : 296 millions d’€ pour Devred, 151 millions pour Burton et 207 millions pour Eurodif.

Cette dernière enseigne réalise un chiffre d’affaires de 192 millions d’€ et possède un parc de 78 succursales de centre-ville. L’évolution de cette enseigne constitue justement un bon exemple de la capacité d’adaptation face au changement de groupe Omnium. Placée sous la houlette de Claude Buffart depuis bientôt trois ans, l’enseigne se recentre actuellement sur son cœur de métier. Après avoir tâté du prêt-à-porter et avoir notamment mis l’accent sur celui-ci au début des années 2000, Eurodif se réoriente vers ses racines en remettant en exergue le textile de la maison. « C’est là que l’enseigne est le plus légitime aux yeux des consommateurs », commente Robert Lascar, indiquant qu’à terme l’offre mode sera centrée sur quelques points forts, comme la lingerie et la layette. Dans ce contexte, la ligne de linge de maison signée Bouchara (marque-enseigne autonome et dont le développement a été confié à la fille de Robert Lascar, Adeline de Monpezat) va prendre de l’ampleur. Depuis son lancement, en 2013, cette licence diffusée dans les magasins Eurodif « fonctionne d’ailleurs plutôt bien ». D’où la nouvelle volonté de la mettre en avant. La réaffirmation de son identité devrait occuper les prochaines saisons d’Eurodif, mais, une fois cette assise réassurée, l’enseigne entend prendre de l’envergure. Au sens figuré (gain de parts de marché, par exemple) comme au sens propre. D’autant que l’enseigne vient de se doter d’un nouveau concept, déployé à Caen et Nantes. « D’ici à 2020, je pense qu’elle se sera tournée vers la franchise », remarque le fondateur d’Omnium de participations.

Principe d’adaptation

Ce serait là une autre application du principe d’adaptation prôné par Robert Lascar. Jusqu’à présent, Eurodif ne fonctionnait qu’en succursales. Demain, son déploiement passera par le partenariat. Le sien tout comme celui des deux autres enseignes du groupe. Alors qu’Omnium vient de bénéficier d’un crédit syndiqué de 110 millions d’€ (à échéance 2020), cette manne, confie le dirigeant, servira uniquement à entretien du parc existant. Cela notamment via la rénovation de certains magasins ou leur mise aux nouveaux concepts, afin de conserver un parc moderne et attractif. Sans prendre de risques démesurés. « Actuellement, on l’observe partout et dans tous les secteurs, les chefs d’entreprise sont en retrait. Ils essaient de consolider leurs acquis avant tout. Aussi, les seuls développements que nous ferons passeront par la franchise », indique Robert Lascar. Celle-ci, « dont la part maximale ne dépassera pas 40 % pour l’ensemble du groupe », servira, entre autres, à asseoir l’expansion internationale de Devred 1902. Mais aussi celle, nationale et d’envergure, de Burton of London.

Forte d’un réseau de 135 magasins, l’enseigne de mode masculine et féminine Burton of London réalise un chiffre d’affaires de 127 millions d’€, « mais elle possède le potentiel pour doubler son réseau hexagonal à terme », assure Robert Lascar.

A terme ? Cet objectif interviendra en effet en deuxième étape. Pour l’heure, l’enseigne – qui vient de changer de dirigeant et a été confiée à Thierry Pérusat juste avant l’été – requiert une autre urgence. « Il faut absolument rajeunir la marque, notamment du côté de l’offre féminine ». C’est donc pour mener à bien cette mission que Robert Lascar – dont le leitmotiv, « il n’y a de richesse que d’hommes », reste, lui inchangé – a jeté son dévolu sur Thierry Pérusat. « C’est un homme qui vient de la distribution, un pragmatique comme moi et surtout un homme de terrain et cela est très important ».

En tentant de séduire une cliente plus jeune (ou du moins au style plus moderne), l’équipe de Burton of London devra tenir compte d’un autre élément pointé par Robert Lascar : « Toutes les garde-robes sont pleines, les gens n’ont pas vraiment de besoin en la matière. De plus, nous ne pouvons rivaliser avec les produits de bonne qualité et à prix cassés, vendus par certaines enseignes internationales. Alors, pour nous, ce qu’il faut désormais, c’est provoquer l’achat coup de cœur, car ce type d’achat permet de vendre à des prix raisonnables, mais aussi avec des marges raisonnables, et cela est primordial dans notre métier. Et les achats coup de cœur se réalisent en innovant, en proposant des collections capsules, par exemple. C’est cela qui permet d’amener le consommateur à venir chez nous ».

Cela et l’outil Internet. Grâce à l’e-commerce – qui est parfaitement « au point pour Devred et Burton », mais doit encore être perfectionné du côté d’Eurodif -, le groupe ne se donne pas seulement un lieu de vente supplémentaire, lequel « devient très vite le premier magasin de chaque enseigne ». Selon Robert Lascar, « le web nous sert surtout à susciter l’envie, l’intérêt, mais aussi le service, afin de ramener le client vers les magasins, dans l’optique de faire de la vente ajoutée ». Autant de projets et d’objectifs qu’il faudra tenir d’ici à 2020. Et ce malgré les aléas environnants, qu’il s’agisse des caprices du climat, de la conjoncture ou des périodes électorales. A l’instar de la campagne présidentielle qui s’annonce et durant laquelle « mon expérience m’a prouvé qu’il n’y a plus rien qui bouge ». Mais, en optimiste anxieux qu’il est, Robert Lascar conclut dans un grand sourire : « Cela dit, les temps difficiles liés à ces causes extérieures sont les mêmes pour tout le monde ».

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